Extrait du Journal : «Le Petit Var» du Jeudi 28 Octobre 1886
«Depuis le 20 octobre, il n’a cessé de pleuvoir. Les précipitations se sont même intensifiées ces derniers jours.
Hier, dès le commencement de l’inondation, le personnel du Bureau des Travaux s’est trouvé sur les points menacés. Au Pont-du-Las, les cantonniers, dirigés par le conducteur de la voirie, ont facilité l’écoulement des eaux de manière à atténuer le plus possible les dommages ; ils ont coopéré d’une façon très active au sauvetage des personnes réfugiées dans les étages des maisons dont le rez-de-chaussée était submergé dans les rues de la Rivière et Navarin.
Les employés du service de la salubrité se trouvaient sur d’autres points et notamment à l’orifice du tunnel des fortifications, afin de le désobstruer.
Il a fallu répéter plusieurs fois cette opération parce que les bois et les broussailles, traînés par le courant, s’appliquaient sur la grille placée à la tête de ce tunnel. Il y a urgence d’enlever cette grille qui peut être la cause de grands dommages».
Mais ceci n’est rien en comparaison des dégâts produits par le débordement du Las. On sait que cette rivière est fort encaissée, hier, grossie en très peu de temps par la crue de tous les petits ruisseaux qui s’y jettent, elle n’a pas tardé à déborder, inondant les lavoirs situés sur son passage et ravageant les jardins potagers qui se trouvent à l’entrée du faubourg.
Puis le Las s’engouffra avec bruit sous la voûte maçonnée qui traverse la place ; le passage souterrain, déjà obstrué par les immondices qu’avaient charrié les pluies précédentes, fut rempli en un clin d’œil et l’eau, s’accumulant de plus en plus, exerça bientôt une terrible pression sur la maçonnerie. Quelques trous d’homme cédèrent heureusement sous la pression et permirent à l’eau de s’échapper, empêchant ainsi l’éclatement de la voûte entière. La place fut en un instant transformée en un véritable lac. Puis l’eau, suivant la pente naturelle du sol, envahit les rues situées en dessous de la route nationale.
Les rues Gilly, Fabrègue, Zoé et Navarin furent littéralement submergées en l’espace de très peu de temps».
«…/… L’aspect de ces rues était pitoyable ; tous les petits jardinets, les rez-de-chaussée et même jusqu’aux entresols de certaines maisons étaient inondés, dévastés ; les habitants de quelques maisons furent même obligés, à un moment donné, de monter sur les toits de leurs immeubles, transformés en habitations lacustres, et on a dû aller les chercher en bateau.
On craignit un instant que la plupart des maisons immergées ne s’écroulent, et M.le Commissaire de police du Pont-du-Las, sur le conseil de M le docteur Perreymond, fit prendre à cet effet de très prudentes mesures. Une corde tenue par des agents fut placée en travers du boulevard de la rivière, où les curieux attirés par le désastre commençaient à se placer en foule. Ce boulevard alimenté par les bouches d’égout, d’où l’eau jaillissait avec force, ressemblait à un véritable torrent. Les eaux, dévalant avec furie le boulevard, se précipitaient dans la rivière.
La quantité de sable charriée par les eaux est énorme ; les rails des tramways ont été obstrués sur tout le parcours ; ce n’est que ce matin qu’on a pu opérer un déblaiement sérieux. Dans certaines rues, force a été d’établir des moyens de communication, soit au moyen de radeaux improvisés, soit encore au moyen d’échelles et de cordes.
L’aspect du quartier est ce matin moins pitoyable qu’hier. Les rues qui étaient submergées ne sont actuellement que couvertes de boue. Les propriétaires inondés s’occupent de vider leurs immeubles. Parmi les maisons éprouvées, citons, sur le boulevard de la rivière, celles qui portent les numéros 15 et 11, dont le rez-de-chaussée et les jardins sont encore à l’état de lac.
Disons, en terminant, que nombre de citoyens se sont montrés pleins de courage et de dévouement vis-à-vis de leurs malheureux concitoyens».
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Les dégâts à Toulon : «…/…Le quartier du Pont-du-Las a beaucoup souffert de l’orage. La rivière Neuve, d’ordinaire presque à sec, coulait à pleins bords, avec fracas, charriant nombre de branches d’arbres, de débris de meubles et aussi épaves.
Les chemins qui bordent cette rivière étaient, hier, littéralement inondés ; ce matin encore, un épais limon parsemé de flaques les couvrait.